mardi 17 mai 2016

TARIF DES NOTAIRES - PETITE BAISSE ET REMISES - LES ACTES COUTENT UN PEU MOINS CHERS

Les actes coûtent un peu moins cher

Tarif des notaires : petite baisse et remises

L'espoir de réaliser des économies significatives en cas d'achat immobilier sera probablement déçu malgré la baisse annoncée du tarif des actes, car de leur côté les droits de mutation ont augmenté.
Prévue par la loi Macron du 6 août 2015 (pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques), la réforme du tarif des notaires et d'autres professions réglementées entre en vigueur en mai 2016. Elle consiste, d'une part, dans une baisse générale du tarif des actes, d'autre part dans la possibilité pour les notaires d'accorder de manière très encadrée des remises à leurs clients. Ce qui ne soulève pas l'enthousiasme du notariat, tant s'en faut« Nous nous attendions à ce que le gouvernement mette en place un tarif plus lisible, mais cela n'a pas été le cas », regrette Frédéric Roussel, notaire à Lille. « Il s'agit en fait d'un petit coup de rabot sur toutes les tranches des différents barèmes ». Avec, dans certains cas (ventes immobilières de faible montant), un plafonnement des émoluments dus au notaire. Quant aux remises, elles auront souvent une portée plus symbolique que réelle comme le montrent les simulations chiffrées réalisées pour notre enquête.

Coup de rabot à tous les étages

Pour comprendre, ce qui change avec cette réforme, il faut d'abord rappeler que les prix des prestations réalisées par les notaires restent, pour la plupart, encadrés : un tarif public fixé par décret leur est applicable (dans ce cadre, la rémunération est appelée « émolument »). Ce tarif est soit proportionnel au montant concerné (ventes immobilières, donations, déclarations de succession), soit forfaitaire et donc fixe, pour les principaux actes concernant la famille (contrat de mariage, Pacs, acte de notoriété). Depuis le 1er mai, l'ensemble des actes tarifés connaissent une baisse des émoluments d'environ 1,33 % pour les actes de vente immobilière, 1,45 % pour les actes de prêt, 1,38 % pour les actes de notoriété, ou encore 1,36 % pour les déclarations de succession. Conséquence : « Cette modification du tarif se traduira par une baisse pour le client de tous les actes tarifés, que le tarif soit fixe ou proportionnel », résume Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris. « Par exemple, un contrat de mariage passera de 195 € pour le notaire (hors coût de formalités telles que les copies ou demandes d'état civil) à 192,33 € ». Si, dans ce cas précis, l'économie n'est pas spectaculaire, pour une vente immobilière, en dehors de la remise qui peut être appliquée à partir d'un certain montant (voir plus bas), le tarif baisse de façon un peu plus appréciable :
- pour un bien vendu 200 000 €, les émoluments d'acte de vente passent de 2 061 € avant le 1er mai 2016, à 2 033,41 € à compter de cette date : soit une différence de 27,59 €, correspondant à une baisse de 1,34 %;
- pour un bien vendu 400 000 €, les émoluments d'acte de vente passent de 3 711 € avant le 1er mai 2016, à 3 661,41 € à compter de cette date : soit une différence de 49,59 €, correspondant également à une baisse de 1,34 % (source : étude de Frédéric Roussel).
À côté des prestations tarifées, certaines prestations (baux commerciaux, par exemple, ou encore actes de société ou consultations juridiques) sont rémunérées par des honoraires libres. « Ils ne devraient pas baisser », précise Nathalie Couzigou-Suhas. Leur fixation donne lieu à une convention signée entre le notaire et son client.

Émoluments plafonnés

Pour les ventes portant sur des biens de quelques milliers d'euros seulement (jusqu'à 9 000 €), le montant des émoluments du notaire ne pourra pas dépasser 10 % de la valeur du bien, avec un plancher de 90 €. Cette mesure concernera surtout les ventes de parcelles de terres ou de forêts, ou, en milieu urbain, de parties communes, caves et parkings d'immeubles. Concrètement, cela se traduira par des baisses assez substantielles. Par exemple : pour une parcelle vendue 3 000 €, la rémunération du notaire sera limitée à 300 € (10 % de la valeur), contre un peu plus du triple (920 €) avant la réforme. En ville, pour un parking vendu 5 000 €, la limite sera de 500 € (au lieu de 742 €), et de 200 € pour une cave d'immeuble vendue 2 000 € (contre 880 € actuellement). Avantageux pour les clients, ce plafonnement est censé notamment favoriser la restructuration du foncier forestier, encore actuellement très morcelé. Dans les villes, seuls les acquéreurs de biens très peu chers pourront en profiter. Pour les notaires des campagnes, cela va représenter un manque à gagner certain, la mesure risquant d'engendrer « de réelles difficultés pour un certain nombre d'offices notamment en zone rurale ou semi urbaine » (selon le Conseil supérieur du notariat). « En pratique, la contrepartie financière de ces transactions pour l'office notarial sera souvent de 90 € hors taxe », estime Frédéric Roussel. « Pour une vingtaine d'heures de travail, raisonnablement, entre la négociation, la préparation, la formalisation et la réception d'une vente de parcelle de terre, faites le compte », s'exclame-t-il.

Des remises très encadrées

Chaque notaire peut appliquer une remise pour les prestations qui font l'objet d'une rémunération tarifée proportionnelle (vente immobilière, donation, par exemple). Elle ne s'applique que pour les différentes tranches d'assiette de la valeur du bien supérieures à 150 000 €. Et cette ristourne ne peut pas dépasser un taux de 10 % pour chacune de ces tranches d'assiette. « Le notaire décide d'appliquer ou non cette remise, qui n'est pas négociable (au cas par cas, NDLR) et bénéficie à l'ensemble de ses clients pour les actes concernés », explique Nathalie Couzigou-Suhas. « Il peut décider d'appliquer 5 % pour les ventes et 2 % pour les donations-partages, par exemple ». Les remises décidées doivent être affichées dans l'étude. Avec cette possibilité nouvelle, les notaires sont susceptibles d'entrer dans un rapport de concurrence entre eux À l'avantage de la clientèle qui saura identifier les professionnels affichant les prix les plus compétitifs. Exemple : pour un achat immobilier de 200 000 €, les 10 % (taux maximum) s'appliquent à la tranche du prix située entre 150 000 € et 200 000 €. Dans cette tranche, le tarif est de 0,814 %. Soit 50 000 € x 0,814 %= 407 € hors taxe. C'est sur ce montant que la remise peut être consentie : en ce cas, elle s'élevera, au maximum, à 40,70 € HT, soit 48,84 € TTC (pour des exemples détaillés situant la remise dans l'ensemble des frais, voir tableaux p. 44 et 45). C'est surtout dans le domaine des transactions immobilières qu'une diminution des frais notariaux associés était attendue. Pour Bernard Cadeau, président d'ORPI « seule une baisse significative des droits de mutation générant une économie substantielle, perçue comme telle, aurait été pertinente ». Comme lui, les professionnels qui auraient préféré que la fiscalité baisse plutôt que leurs honoraires, ne se rangent pas dans les fervents soutiens à la loi Macron! Reste à espérer que les clients des offices y trouveront un peu leur compte
10 %
Taux maximal de remise que le notaire peut appliquer sur le tarif de certains actes pour une partie du prix
Les droits de mutation ont été revus à la hausse
Le problème avec l'expression générique fréquemment employée de « frais de notaire », c'est qu'elle est fausse! Elle confond deux choses très différentes, la rémunération du notaire proprement dite, et les droits de mutation à titre onéreux, impôt revenant aux départements qui est collecté par le notaire mais qui ne lui revient pas. « Le public est induit en erreur par cette confusion s'il croit que les frais à payer lors d'un achat immobilier vont baisser de 10 % », observe Bernard Cadeau, président du réseau immobilier ORPI. Dans la réalité, les pendules doivent être remises à l'heure, deux fois.
D'une part, si la rémunération du notaire a été revue à la baisse, et de manière très sensible pour les transactions d'un faible montant, la fiscalité, elle, a augmenté depuis 2015. « Si l'on compare le coût, pour le client, de l'acquisition d'un bien de 200 000 € à Paris entre 2015 et 2016, on constate qu'il paiera plus en 2016, cela en raison de l'augmentation de la taxe départementale sur la mutation, passée de 3,8 % à 4,5 % de la valeur du bien le 1er janvier 2016 », rappelle Nathalie Couzigou-Suhas. Pour une vente de 200 000 €, en effet, cet impôt est passé de 7 600 € à 9 000 €, soit une augmentation de 1 400 € (+ 18,42 %).
D'autre part, la « baisse de 10 % », appliquée à titre de remise facultative, ne peut porter que sur une partie seulement du tarif des notaires, au-delà d'un certain montant (voir : Des remises très encadrées p. 45).
-1,33 %
Baisse du tarif des notaires pour les ventes immobilières, soit 49 € d'économie pour un bien valant 400 000 €